Être père continuait d'être... une expérience compliquée, pour Astarion.

Il n'avait jamais vraiment pensé être le genre de personne qui ferait un bon père. Trop ambitieux, trop égoïste, trop centré sur sa carrière... il y avait un tas de traits en lui qui criaient "mauvais papa" - des reproches que la mère de Nami lui avait déjà fait souvent, d'ailleurs. Et il n'avait pas la fibre paternelle. Ou en tout cas, il ne pensait pas. Comment aurait-il su ? Son père à lui n'avait jamais rien fait dans sa vie pour lui communiquer son amour. Plutôt le contraire, à vrai dire. Et Astarion n'avait jamais rien connu d'autre... Alors avec une petite gamine, comment était-il sensé se débrouiller ?

Et bien, honnêtement, 21 ans après sa naissance, il n'était toujours pas sûr de la réponse. Mais au fil des années, il avait fait de son mieux. Et il n'était pas toujours parfait, clairement... Au niveau de la vie de tous les jours, c'était la mère de Nami qui gérait tout. Astarion se contentait d'alonger l'argent, et d'essayer d'être présent lors des événements importants de la vie de sa fille, même s'il fallait avouer qu'occasionnellement, il avait eu d'autres priorités.

Il essayait de se tenir au courant de sa vie, de ses projets, de la soutenir là où elle en avait besoin. Quand elle passait du temps chez lui, il la laissait en général vivre sa vie comme il lui semblait. Les règles, avec lui, étaient des plus laxistes... Après avoir grandi dans un environnement strict à l'extrême, il avait un peu pris la direction opposée. A l'occasion, au grand dam de sa mère, il lui montrait même le mauvais exemple en lui montrant des façons de tricher les systèmes.

C'était le genre de père qu'il était. Et un spectateur extérieur aurait pu croire, en le voyant, qu'il s'en foutait. Et pourtant... ce n'était vraiment pas le cas. Il aimait sa fille, profondément - plus que n'importe qui au monde, sans doute. Il était fier d'elle, se reconnaissait même en elle par certains aspects. Et... il se connaissait assez, avec ses fautes et ses défauts, pour avoir peur de ne rien avoir à lui apportrer de bon. Et donc il gardait ses distances. C'était tellement plus simple ainsi !

Mais néanmoins, une chose était certaine. Si quelqu'un blessait sa fille, cette personne le regretterait. Et justement... Justement, depuis une semaine, il avait peur que ce soit le cas. Depuis ce soir où elle était rentrée en pleine nuit sans prévenir, où il l'avait juste vue prendre la fuite au matin sans une explication, laissant en arrière une scène inquiétante... Tellement inquiétante qu'il avait lui-même pris contact avec son ex femme pour essayer de savoir ce qu'elle savait de la situation, et qu'il avait passé le reste de la semaine préoccupé, à se demander que faire.

Jusqu'à ce soir. Leur rendez-vous habituel au diner. Le moment parfait pour en apprendre plus, n'est-ce pas ? Il ne voulait certainement pas la forcer à dire quoi que ce soit. Il voulait être délicat, pour une fois...

-"Nami ! Je commençais... Je suis content de te voir." Ce qui était un peu ridicule à dire, vu qu'ils se voyaient là toutes les semaines.

Là, comme ça, elle avait l'air d'aller bien, comme d'habitude. Il remarqua cependant très vite plusieurs détails interpellants dans son apparence. Son tatouage fraichement couvert - celui qu'elle s'était fait avec son ami, il y a plusieurs années. Et surtout les traces d'un hématome sur son visage (il avait du en cacher assez lui-même pour les remarquer immédiatement). Son sang commençait à bouillir, là - mais il devait rester patient, comprendre ce qui se passait avait d'agir.

-"Est-ce que tout va bien ? Tu es partie... très rapidement, la semaine passée." Il ne mentionnerait pas le tattoo, le bleu, pas tout de suite. Attendre de voir si elle amenait le sujet elle-même était plus prudent. "Tu es libre d'aller et de venir de la maison comme bon te semble, bien sûr. J'ai juste été surpris."

My dear, my dear,
Out of a lair in the flocked leaves in the dew dipped year
To eat your heart in the house in the rosy wood.