Mayday, Mayday, Assistance requise

Durant son temps libre, il n’était pas rare que Sejanus erre dans le centre de Blackridge, ou dans les zones un peu plus désertes, là où il pouvait se passer des trucs potentiellement louches. Le jeune homme avait souvent évité de se retrouver lui-même dans les problèmes, même s’il savait se défendre, le fait que pas mal de gens ici soient dotés de pouvoirs magiques déséquilibrait légèrement les chances. Il était particulièrement doué pour rester dans l’ombre, ne pas se faire remarquer, et faire quelques pas en avant lorsqu’il se rendait compte que quelqu’un avait besoin de soin. Amusant, quand on savait à quel point il avait pu ne pas être discret dans son ancienne vie, à quel point il avait pu faire des esclandres pas possibles, et être un véritable problème pour le Capitole. Et oui, mais la différence, c’était que Silvergate n’était pas une société profondément injuste et violente. Blackridge était peut-être un quartier plus délinquant que d’autres, mais il n’avait pas de raison se s’insurger contre le système lui-même. Il pouvait seulement aider à limiter les dégâts. Et ce n’était pas plus mal.

Le jeune homme s’était dirigé dans la zone industrielle, avec quelques amis de la fac. L’université, voilà bien quelque chose qui demeurait pour lui particulièrement agréable. Il pourrait bientôt dédier sa vie à soigner les autres, et ça le remplissait d’un sentiment d’apaisement. Ils s’étaient posés dans un coin calme, et avaient passé des heures au soleil à discuter de tout et de rien, des étudiants tout à fait normaux. Pas le moins du monde inquiet, car ils étaient en nombre. Et puis, chacun avait pris la direction de chez lui. Sejanus se trouvait maintenant seul et se dirigeait vers le centre-ville. Il tourna dans l’une des ruelles qu’il savait être un raccourci. Pas tout à fait prudent, mais Sejanus avait-il vraiment été quelqu’un de prudent au cours de ses deux existences distinctes ? Non, du tout.

En tournant à l’angle, il aperçut une silhouette, et songea instinctivement que faire le détour serait donc plus sûr, puisqu’il ignorait quelles affaires louches pouvaient avoir lieu dans cette petite ruelle éclairée par quelques lampadaires. Une ruelle bien planquée, et en même temps pas trop. Un spot quasi idéal, peut-être. Mais en y regardant à deux fois, la position de l’homme n’était pas celle de quelqu’un d’entièrement bien portant. Une veste sur le sol, et une main qui s’attardait vers l’épaule.

- Oh, merde.

Les rouages s’activaient, et Sejanus se mit à courir vers l’homme, par pur instinct d’inquiétude. L’instinct de survie, c’était tout à fait secondaire chez lui, il fallait l’admettre.

- Est-ce que tout va bien ?

Etant donné que l’homme lui tournait le dos, il préférait d’abord s’assurer de son état avant de se lancer dans quoi que ce soit, mais il pouvait sans doute faire quelque chose : il était presque médecin -à deux ans près-.

Mayday, Mayday, Assistance requise

Au cours de son existence à Blackridge, Sejanus avait assisté pas mal de gens qui avaient été victimes d’agressions. Tête brûlée, il n’avait jamais eu peur de s’en mêler s’il pensait que quelqu’un était en danger, non plus. Beaucoup de gens le voyaient comme quelqu’un de calme et gentil, mais c’était essentiellement parce qu’ils n’avaient jamais eu l’occasion de voir jusqu’où il était capable d’aller s’il estimait qu’une situation était injuste ou déséquilibrée. Il était particulièrement teigneux face à ce genre de choses. Naturellement, il s’était donc dirigé au pas de course vers l’homme qui se trouvait là, qui ne se tenait pas tout à fait droit, comme s’il pansait une blessure qu’il ne voyait pas encore. Il le vit essayer de se relever, et rechuter. Sejanus accéléra le pas pour l’aider.

Avant qu’il n’ait le temps d’arriver, l’homme avait changé son angle, permettant à Sejanus de voir l’étendue des dégâts. Il posa un genou à terre pour arriver au niveau de l’inconnu. En réalité, il serait sacrément facile de tendre un piège à quelqu’un comme Sejanus. Ce ne serait pas la première fois qu’il se faisait avoir. Foncer tête baissée dans les problèmes permettait aux plus calculateurs de prévoir certaines de ses actions -bien qu’il reste imprévisible pour bien des choses, il y avait quelques récurrence-.

- Heureusement, les loups-garous ne sont pas nombreux ici. Laissez-moi voir…

Il posa les yeux sur la blessure à l’épaule, et quelque chose le frappa comme n’étant pas normal. Il mit quelques secondes à réaliser que le sang n’avait pas la même teinte que l’accoutumée. Sejanus fronça les sourcils, et regarda la main de l’homme, couverte de bleu. Qu’est-ce que c’était que ce sang ? Il sortit de sa torpeur lorsque l’homme lui rappela la base : arrêter l’hémorragie. Oui, bien sûr ! Sejanus ouvrit son sac pour prendre un chiffon propre. Il le tendit à l’homme.

- Appuyez sur votre blessure à l’épaule avec ça.

Lui… Bon, il allait s’occuper de la jambe. Mais il avait besoin d’un autre morceau de tissu. Sejanus n’avait pas vraiment le temps de réfléchir plus loin, il ne se baladait pas avec un stock de chiffon, juste un en cas de problème. Il déchira un morceau de son t-shirt, à court d’option, pour appuyer sur la blessure de la jambe et contenir l’afflux de sang. Le jeune homme se demandait tout de même pourquoi et comment le sang de ce gars pouvait être de cette couleur.

- Excusez-moi, mais… Votre sang est de couleur bleu ? Est-ce que c’est normal ?

Non parce qu’on ne savait jamais, si ça se trouve il avait été empoisonné. Si tel était le cas, Sejanus préférait le savoir. Mais ça devait être un sacré potion, dans ce cas.

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Le jeune homme avait toujours sur lui de quoi aider l’une ou l’autre personne. Il connaissait trop bien les rues de Blackridge, et surtout, il ne voulait surtout pas être impuissant s’il tombait sur une situation d’urgence. Et qu’est-ce qu’il était bien inspiré ! Il ne comptait plus le nombre de gens qu’il avait pu aider dans ces rues malfamées. Il ne remarqua qu’après coup cette lumière rouge qui émanait d’un truc que l’homme avait sur la tempe. Bizarre. Mais pas aussi bizarre que tout ce qu’il avait pu voir sur cette île, sans doute. La lumière semblait diminuer progressivement dans sa vitesse, ce qui était… étrangement rassurant. Sejanus ne savait pas ce que ça voulait dire, mais ça lui paraissait plutôt positif.

Il continua d’exercer une pression sur la jambe de l’inconnu, le sang étrangement bleu le laissait perplexe, mais cela sembla un peu plus logique lorsque Connor se présenta comme un androïde. Hm, il ne connaissait pas le moins du monde Cyberlife, mais ce qu’il savait, c’est qu’il était sacrément content que, dans son monde à lui, cette technologie n’ait jamais été développée. Les drônes étaient peu précis, et il n’y avait plus grand chose de technologique, en dehors de la télévision, du moins à son époque.

Sejanus soupira, un peu soulagé, lorsque tout sembla se stabiliser. Il ne s’attendait cependant pas à ce que Connor ne sache qu’il était encore étudiant. Il n’avait fait que stopper l’hémorragie avec des chiffons… Un bon réflexe, mais était-ce vraiment aussi significatif que ça ?

- Deux ans.

A son arrivée, il avait fallu le temps qu’il comprenne où il était, qu’il suive quelques cours sur la ville, et il avait pu commencer son cursus de médecine. Ca faisait cinq ans maintenant qu’il était en apprentissage, et il avait hâte de terminer ses études pour pouvoir réellement se rendre utile. Et puis, les études de médecines étaient parmi les plus longues. Il avait accompli la plus grande partie de ses études, un vrai soulagement.

- Je m’appelle Sejanus. Et il n’y a pas de quoi, ça me fait plaisir d’aider.

Puisque Connor s’était présenté, il en faisait de même. Le jeune homme n’était qu’un humain, une chose pas tout à fait fréquente sur cette île. Il connaissait peu d’autres gens dépourvus de pouvoirs. Mais il le vivait très bien. Au fond, il était déjà bien assez chanceux de s’être retrouvé ici.

- Qu’est-ce que vous avez fait pour vous mettre un loup-garou à dos ?

En général, ils pouvaient attaquer par manque de contrôle, mais il n’était pas sûr que ce soit vraiment le cas ici, sinon Connor aurait été réduit en charpie aussitôt. Et puis, les loups-garous n’étaient vraiment pas communs, ici. Les vampires, oui. Les loups-garous ? Sejanus les connaissait un peu moins bien.