Home, Sweet home ! déclara Nami avec satisfaction.
Le
Mind Warp était sa demeure, bien sur. L'astrolithe avait grandi dans le petit vaisseau qui était autrefois connu comme le
Cursed Star, siège ambulant du traffic de ses parents criminels. Mais Bonnie & Clyde le lui avaient toujours dit : home is people, not just a place.
Quand les deux criminels avaient été descendus par les autorités d'Elvion, neuf ans plus tot, Nami avait pris la fuite sans meme reprogrammée la destination de la navigation assistée : Junkertown. Après tout, l'adolescente d'alors ne savait pas où aller. Elle avait toujours le vaisseau, mais son chez-elle lui avait ete arraché.
Le vaisseau avait pris des degats dans la poursuite. Quand il était rentré dans le champ de gravité de la planète naine avoisinant Junkertown, les stabilisateurs anti-gravitationnels avaient refusé de se déployer. Et elle s'était crashée sur cette planète naine, à l'atmosphère respirable, mais aux ressources incapable de sustenter un humain ou un astrolithe.
Nami serait morte de faim et de soif bien avant d'avoir remis le vaisseau en état de décoler si Odessa n'était pas venue à sa rencontre. Elle attendait la
Cursed Star après tout, mais pas si tot - et certainement pas sur B613.
Elle avait aidé une Nami miraculeusement indemne à sortir des décombres. Elle l'avait ramenée sur Junkertown, vaisseau en remorque. Elle l'avait accueillie parmi les siens alors que Nami pensait n'avoir plus personne sur qui compter. Le vaisseau retapé, intégralement repeint, et aménagé en bar, rebaptisé le
Mind Warp était à elle, bien sur, mais Junkertown était son véritable chez elle, et la Reine de céans était désormais ce qui se rapprochait le plus d'une famille pour elle. Et la jeune fille avait toujours fait preuve envers sa bienfaitrice d'une loyauté sans faille.
Nami était arrivée si tard dans la soirée qu'une fois le vaisseau magnéto-amarré sécuritairement, elle était allée prendre quelques heures de repos bien mérité. Mais aujourd'hui, elle devait faire une inspection technique complète avant d'ouvrir le bar ce soir.
Elle avançait pas mal, à vrai dire - elle avait coché des cases dans sa check-list, fait des réparations mineures, commandé des pièces de remplacement. Et puis elle avait entendu un bruit, dans les conduites d'aération. Des conduites dont elle était familière, car elle-même s'y était cachée le jour de la capture de ses parents, avant de bondir aux commandes dès qu'elle avait été seule, pour dégager le vaisseau du remorquage et prendre la fuite. Elle n'avait pas tardé à en trouver la source.
What the actual fuck ?!Un passager clandestin s'était caché dans son vaisseau. Et pour ne rien arranger, l'individu était un cyborg. Une espèce formellement interdite sur Junkertown par sa Reine en personne. Elle aurait dû le jeter dehors comme un rat trouvé dans la cale, ou le dénoncer à Odessa. Mais cette personne lui avait adressé un regard suppliant, lui expliquant ne pas avoir le choix, n'avoir nulle part où aller... Et Nami s'était reconnue dans cette situation.Alors, quand le pas robuste de Dez avait retenti, quand elle avait entendu sa voix forte depuis l'extérieur... Nami avait hâtivement, et en le regrettant déjà, ordonné au passager clandestin de se replanquer et de ne pas faire le moindre bruit. Si la Reine cramait sa présence, elle ferait semblant de n'en rien savoir, et l'inconnu devrait se débrouiller sans son aide. Fallait pas déconner non plus.
Et puis elle s'était tournée vers Odessa comme si de rien n'était. "Et bien, et bien. Regardez-moi qui est de retour", avait dit la reine en s'avançant, se penchant dans le vaisseau un peu trop bas. Le
Mind Warp n'était pas une capsule - ou elle n'aurait pas pu en faire un bar - mais il n'avait rien de ces gigantesques vaisseaux qui sillonnaient la galaxie. Il était structuré en trois cercles : une cabine de pilotage, une grande pièce circulaire qui constituait le bar - au plafond un peu bas, il fallait bien y voir quand on était aux commandes - et deux compartiments latéraux qui renfermaient les moteurs et les machines, où l'on ne pouvait circuler qu'à quatre pattes. Quand aux conduites comme celle où se trouvait le passager clandestin, elles se trouvaient dans le sol du vaisseau.
Elle se demandait où était Nami, et croyait qu'elle serait de retour une semaine plus tôt. Quelles étaient les nouvelles ? Elle inclina la tête pour saluer sa reine, puis déclara :
J'ai été prise dans un orage géomagnétique près d'Astria - une sacrée tempête. Je devrais m'en sortir pour réparer tout ça quand j'aurais récupéré mes pièces, mais en attendant, ça ne m'empêchera pas d'ouvrir.C'était la véritable et unique raison de son retard. Nami ne manquait pas à Odessa. Jamais.Alors pourquoi ne lui parlait-elle pas de l'andouille qui était cachée juste sous les pieds de la reine, hein ? C'aurait été si facile. Mais le souvenir des heures effroyables qu'elle avait passées cachée sous ce même plancher, craignant d'être repérée à tout instant, l'en rendait incapable. Au lieu de cela, elle commença le rapport qu'elle avait préparé. Comme toujours, elle ne dissimulait rien à Odessa, mais allait à l'essentiel, à ce qui risquait de l'intéresser - pas le mari volage qu'elle avait localisé sur Silvergate en échange de quelques milliers de crédits de la part de son épouse restée sur Elvion.
Il y a une banque de la zone commerciale de Silvergate, Mayhew Credits, qui veut ouvrir une succursale sur Elvion... Mais ils n'ont pas souscrit aux "assurances" offertes par Asco Corp, et cherchent donc à ne pas trop attirer l'attention. Le "Crosser", un vaisseau non brandé et non escorté, décollera le premier lundi de juin pour un transfert de fonds et d'équipement. Nami servit un verre à la Reine, au niveau du bar.
Ce serait dommage qu'il arrive quelque chose au vaisseau en cours de route, pas vrai ? reprit-elle avec un sourire mutin.
Elle se versa son propre verre et le leva à la santé de sa reine. Elle avait l'estomac retourné par la trahison qu'elle était en train d'accomplir en dissimulant cet individu, et un peu d'alcool lui ferait le plus grand bien.
A part ça... Il y a du grabuge du côté d'Asco, justement. Paraît que la veille Goodwin a recherche sa cyborg et sa gosse, et que son ex-mari va un peu trop souvent chez le docteur, en ce moment. Et à part ça, c'est un détail, mais...Nami sortit de sa poche un objet qui ressemblait à une sphère de métal parfaitement lisse et dénuée d'enfractures, qu'Odessa avait déjà vu pas mal de fois, depuis le temps. Elle le fit chauffer doucement dans ses mains, jusqu'à atteindre la fréquence désirée, et la vibration de la chaleur fit éclore la sphère comme une fleur. Les données étaient illisibles, comme si l'ensemble de la structure du plan avait été roulée en boule et repliée sur elle-même. Nami plaça ses mains au coeur de l'hologramme et, avec des gestes soigneusement chorégraphiés dont elle seule avait le secret, et qui s'accompagnaient d'un coup de chaud par ici, un coup de froid par là, elle le déplia.
La carte de l'univers en trois dimension était légendée : les noms de planètes et de certains éléments étaient inscrits clairement, le reste du texte était codé par un savant cryptogramme, et encrypté pour faire bonne mesure. Quand à Junkertown... La station était tout simplement absente de la carte, le seul endroit qu'elle avait découvert dans le dessiner.
Nami zooma jusqu'à révéler un petit point lumineux.
J'ai repéré une nouvelle météorite.Son arc prévisionnel montrait qu'elle allait longer Sabeos, puis Astria, à une distance suffisamment grande pour n'avoir aucun impact sur ces planètes et ne pas être visible depuis leur surface, ni s'enrouler dans leur gravité. Nami zooma davantage, révélant une surface que l'on devinait scintillante même à cette distance.
Mes scans indiquent qu'elle serait richement chargée d'un métal diamagnétique - probablement du palladium.Un métal très utilisé pour les composants électroniques des vaisseaux spatiaux, et qui valait bien plus que son pesant d'or. Le regard de Nami étincelait à cette nouvelle découverte spatiale, mais elle n'oubliait jamais son intérêt personnel.
Alors pourquoi ne balançait-elle pas l'imbécile sous son plancher ? Incapable de trouver une véritable explication sensée et rationnelle, elle descendit un nouveau shot de whiskey.