Mad World

feat @Faith Lehane

Le carrelage n’était pas forcément le sol le plus confortable du monde. Pour autant, effectivement ça pouvait toujours être pire, comme dormir sur le sol de l’extérieur en pleine pluie. Mine de rien, ce genre de rapprochements avec l’équipe tactique piquait toujours un peu le coeur du marin. Il se sentait bien dans son équipe, autrefois. Il leur faisait confiance, et ils n’avaient pas pu en faire de même. Les voir lui tourner le dos n’était pas forcément étonnant, mais leur mépris était pire que tout. Ils avaient été ses amis, et désormais, la plupart d’entre eux le voyaient comme un couard. Ce qu’il était, peut-être. Mais ils n’avaient pour autant pas besoin de lui en mettre plein la tête. Chaque jour, on rappelait à Theon ce qu’il s’était passé. Et chaque jour, il se demandait s’il ne finissait pas par être autant détesté que ne l’était Sanders. Comme à son habitude, il ressentit donc ce pincement au coeur lorsqu’on mentionnait les missions tactiques. Mais il n’en dit rien. Encaissant toujours sa condition de “traître”, le marin espérait un jour regagner son honneur.

Faith était l'une des rares, si pas la seule, de l’équipe Bêta qui ne semblait pas lui tenir rigueur de ce qu’il s’était passé. Theon se demandait souvent s’il aurait pu aider, empêcher quelque chose… ou s’il aurait fait pire, et qu’une victime de plus aurait été à déplorer. Il ne pouvait revenir en arrière, et il ne le saurait jamais. Lorsque sa camarade lui tendait la flasque, après avoir parlé d’Aleksander, c’est sans hésiter que le marin la prit pour prendre une plus longue gorgée. Il en avait bien besoin. Le liquide amer, agréable et désagréable à la fois, ne pouvait que l’aider. Il lui réchauffait néanmoins le coeur autant que les propos rassurants de Faith. Parfois, il avait besoin de quelqu’un d’autre pour l’aider à se rappeler qu’il n’avait fait que faillir une fois. Une seule fois, la fois de trop, et celle où il y avait eu une victime.

- Ils ont besoin d’un responsable. Sanders est mort avant qu’ils n’aient extériorisé toute leur colère.

Souvent, il avait la sensation d’être un réceptacle pour les émotions négatives que l’attaque de Sanders avait créées. Ce qui n’était foncièrement pas juste : il n’était pas Sanders, ni un de ses hommes. Il avait seulement été paralysé par la peur, celle de faire pire que mieux, celle de la mort, aussi. Theon se doutait, du comportement de Faith, qu’elle avait eu, et avait peut-être encore des sentiments pour Kirigan. Il n’était pas aveugle. Par moments, il avait eu la sensation que toutes les femmes de la communauté lui couraient après, à celui-là. Une pointe de jalousie, peut-être ? Dans tous les cas, il pensait que Faith lui en parlerait si elle en avait envie. Ce n’était pas à lui d’amener le sujet, de l’amener à se confier. Elle le ferait si elle en avait le besoin, si elle pensait qu’il était la bonne personne pour recueillir ses émotions.

- Merci, ça compte beaucoup, en ce moment.

Trouver un peu de soutien était rassurant. Certains ingénieurs restaient amicaux, des gens des étages supérieurs, aussi. Le marin avait des nuits assez agitées, mais pas uniquement à cause de cette histoire. Ses rêves semblaient perturbés, comme s’il ne faisait en boucle que des cauchemars dont il ne se souvenait pas, mais dont il était sûr qu’ils ne concernaient pas Sanders et Kirigan. Theon se leva après quelques instants pour rejoindre sa camarade à la fenêtre. Son regard se posa sur les zombies, qui restaient dans les environs sans jamais pénétrer l’enceinte.

- Je vois ce que tu veux dire. C’est vrai qu’ils feraient de bonnes cibles. Mais ça risquerait de rameuter tous leurs potes qui se baladent dans les parages.

Il glissa l’une de ses mains dans une de ses poches. Les zombies avaient toujours eu quelque chose d’effrayant, à ses yeux… En fait, il ignorait ce qu’il craignait le plus entre eux ou la mort. Dans tous les cas, ils lui filaient la chair de poule. Mais eux, il les avait toujours affrontés, au moins.

- Le monde a beau tourner fou, il reste notre monde. Bien que, selon moi, il manque de bateaux et de voyages.

La mer lui manquait, c’était évident. Theon avait passé une grande partie de sa vie sur l’eau, depuis son adolescence jusqu’à l’apocalypse. C’était dans son sang, et dans son âme, les flots gravés en lui comme dans du marbre. Mais il ne pouvait de toute évidence pas y remédier, et il avait accepté le fait qu’il ne reverrait sans doute jamais l’océan. Mais ça ne l’empêchait pas de se rappeler de cette période avec nostalgie. L’époque où le monde tournait rond. Et le monde de Faith, avant tout ça, quel était-il, au fond ? Il en savait peu de choses.

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Theon avait préféré se cacher durant le combat contre Sanders, et il avait du mal à accepter son propre comportement, parfois. Et le fait que tout le monde lui remette ça sur les épaules n’aidait vraiment pas. Le pire, c’était sans doute Inej, qui continuait de faire des pieds et des mains pour lui faire comprendre qu’il n’avait plus vraiment sa place dans la communauté. Elle le haïssait, comme s’il était Sanders en personne. Et puis, il y avait Five, à qui il n’avait pas vraiment osé parler depuis. Le marin savait a moins qui étaient ses alliés et ses ennemis.

Faith avait le don de lui réchauffer au moins un peu le coeur. Theon se sentait assez bien, en sa compagnie. Elle comprenait sa situation, et elle avait beau avoir eu une histoire avec Aleksander, elle ne lui en tenait pas rigueur. Alors, il lui sourit, avec gratitude. Ca faisait du bien, il avait l'impression de trouver un peu d’air frais dans un nuage nauséabond. Pour l’instant, ça lui suffisait amplement, la sensation d’avoir au moins une personne qui voulait bien lui laisser sa chance.

Il écouta Faith mentionner son voyage, entre Boston et Silvergate. Et il devait bien admettre qu’il avait été heureux de pouvoir voyager, voir le monde. Cela manquait au marin, qui se sentait souvent à l’étroit, à Silvergate. L’eau lui manquait, le sel d’une virée en mer lui manquait.

- En tout cas, je suis content que tu sois en vie, et à Silvergate.

Le Greyjoy lui sourit. La communauté ne serait pas pareille, sans Faith, et sa présence l’aidait. C’était peut-être égoïste, peut-être voudrait-elle être ailleurs. Mais il semblerait qu’elle ne soit pas en très bons termes avec sa famille. Theon aimait à penser que ce monde avait rétabli le karma d’un certain nombre de gens. Mais lorsque Faith s’excusa de parler de son histoire, Theon ne put lui en vouloir.

- Il n’y a pas de mal, si tu as besoin d’en parler, ça ne me dérange pas. Tu sais, je crois que le karma a frappé tous ceux qui devaient en être frappés. En tout cas, c’est ce que je préfère penser.

Et comme il n’aurait pas de confirmation ou quoi que ce soit qui invalidant sa théorie, il pouvait croire ce qui l’arrangeait pour se sentir mieux. Bien que Theon n’avait de griefs avec personne, il pouvait comprendre que ce n’était pas le cas de tout le monde. Ce qui était sûr, c’était qu’Aleksander avait la cote auprès des femmes, il faudrait être idiot pour le nier. Et en effet, il n’avait jamais eu l’air particulièrement sérieux.

- On ne choisit pas vraiment à qui on s’attache. Ce n’est pas ta faute.

Le coeur pouvait parler sans qu’on ne le veuille, on pouvait être attiré par quelqu’un en sachant que c’était une mauvaise chose. Theon ne pouvait pas en tenir rigueur à Faith, et il espérait qu’elle était également indulgente avec elle-même. Le marin songea que la femme qui se tenait auprès de lui actuellement pourrait faire un très bon chef pour l’équipe tactique. Mais il garda cela pour lui, il ne lui appartenait pas de décider. Five était trop impulsif, de même qu’Inej qui manquait d’objectivité. Quant à Lexa, elle ne lui paraissait pas forcément aussi raisonnable que Faith.

- J’imagine que vous le saurez bientôt. Ils ne vont pas vous laisser sans chefs indéfiniment.

Theon ne se considérait pas dans l’équipe, puisqu’il était rétrogradé depuis le temps. Il espérait bien retrouver sa place un jour, mais il faudrait du temps, le temps qu’il fasse amende honorable. Et puis, il songea à ses voyages. Lesquels étaient les plus beaux, les plus agréables ? Une destination lui venait rapidement en tête.

- Souvent. Mais ce n’est pas possible. Mais naviguer, c'est une liberté incroyable. On regarde l'infinité de l'océan, on a l'impression de pouvoir aller partout et nulle part à la fois. Le monde est à nous.

La mer lui manquait. La sensation de naviguer à l’infini jusqu’à ce qu’il n’y ait plus rien autour. Le Greyjoy donnerait beaucoup pour respirer un peu d’air marin, chargé d’une odeur de sel purifiante et apaisante.

- Venise. C’est entouré d’eau, et c’est très joli, peu importe la saison. Et puis, il doit y avoir beaucoup moins de touristes, maintenant.

Une fine plaisanterie sur le monde, chercher du positif dans l’apocalypse. Venise devait être beaucoup plus déserte, beaucoup moins peuplée. Et ce devait être très agréable de s’y balader. En plus, on pouvait avancer en péniche, en étant quasiment constamment sur l’eau. Le paradis pour un marin qui avait un certain manque des flots.

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Pour Theon, beaucoup de choses avaient changé, et ses relations avec la plupart des gens s’étaient déteriorées. Il ignorait, à ce stade, qu’Inej s’amusait à lui tailler une mauvaise réputation auprès de la majorité des membres du Bâtiment, spécialement auprès des femmes. Honnêtement, s’il l’avait su, cela ne l’aurait pas non plus particulièrement étonné. L’entêtement d’Inej à lui mener la vie dure contrastait avec la bienveillance de Faith à son égard. Au moins, il se sentait un peu moins de côté, grâce à elle. Un peu moins détestable, aussi, sans doute. Il avait toujours essayé de faire le bien, mais il se laissait parfois dépasser par sa peur presque maladive de la mort. Ca ne lui était arrivé qu’une fois, mais c’était vraisemblablement la fois de trop. Forcément, il ne pouvait qu’être content que Faith soir arrivée dans le Bâtiment. Et il voulait l’aider à son tour. S’il devait l’écouter parler de Kirigan pendant des heures pour cela, il le ferait.

- Tu ne peux pas te blâmer. Les sentiments sont naturels, et souvent hors de contrôle. On peut rarement expliquer son propre comportement dans ces cas-là…

Theon en savait quelque chose, parce que de son côté, ce n’était pas l’amour mais la peur qui l’avait emporté. Ce n’était pas pareil, mais cela restait des émotions qu’il avait été bien incapable de gérer, et qui générait une sensation de culpabilité aujourd’hui. D’une certaine manière, ils étaient dans le même bateau. Il était en revanche content de n’avoir jamais été pris par l’amour, parce que ça avait l’air un peu trop prise de tête à son goût.

- Et j’imagine que Kirigan n’a rien fait pour t’aider.

Il ne le connaissait pas très bien, mais il ne serait pas franchement étonné que Aleksander n’ait rien fait pour que Faith ne s’attache pas. Theon laissa ses pensées dériver vers ses nombreux voyages. Déjà plus jeune, il accompagnait son père en mer lorsqu’il le pouvait, la moitié de sa vie avait été sur les flots. Evidemment, cela lui manquait. Un sentiment de liberté comme il n’en avait jamais eu. Effectivement, les zombies nageaient rarement, et une fois la ville purgée, il était possible qu’il n’y en ait plus du tout. Ca devait être sacrément reposant.

- C’est peut-être vraiment le paradis, sans zombie et avec du poisson à volonté. Et si ça n’est pas viable, il reste à essayer les îles de Grèce. C’était déjà paradisiaque avant l’apocalypse.

L’idée de prendre un bateau et d’aller voir si ces endroits étaient habitables allait finir par le tirailler… Et il n’était visiblement pas le seul. Il regarda par la fenêtre, vers l’horizon. Un horizon qui avait été si proche, aujourd'hui si loin. Une liberté qui lui manquait, et finalement, qu’est-ce qu’il lui restait dans cette communauté, qu’est-ce qui le retenait ? Certains voulaient déjà qu’il s’en aille. C’était peut-être le moment de le faire…

- Tu sais, j’étais en mer quand l’apocalypse a commencé. On n’était pas au courant. Pendant que tout le monde se transformait en zombie sur la terre, nous on se marrait sur notre bateau et on buvait des bières. On était complètement hors du temps.

Des moments de normalité alors que le monde prenait feu. Ils en avaient tiré, une drôle de tête, quand ils avaient accostés sur le continent et n’avaient vu personne au port. Lorsque Theon était revenu à Silvergate, c’était tout aussi désert, et sa mère était un zombie. Son père n’avait jamais donné signe de vie. Il prit le temps de réfléchir à la question de Faith. La maison blanche avait perdu tout son symbolisme, à ses yeux.

- Sans doute. Qui se soucie encore du président ? Il est sûrement mort, et ça doit être un des endroits les plus faciles à défendre de la région. Si j’avais été dans les parages, j’aurais sans doute tenté ma chance là-bas.

Le marin se demandait bien ce qui pourrait empêcher qui que ce soit de voir cet endroit autrement que comme une super opportunité d’être tranquille dans  un endroit grand et luxueux.

- Plus rien n’a d’importance, à part survivre.

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Faith avait besoin d’extérioriser un peu ses sentiments à l’égard de Kirigan, et le Greyjoy était disposé à l’écouter, en soi. Il pouvait comprendre qu’une telle disparition puisse être difficile à vivre. Theon n’avait jamais été sentimentalement attaché à qui que ce soit, et il n’allait certainement pas s’en plaindre, au vu du monde dans lequel ils vivaient. Il ne comptait pas que ça arrive. Vu l’état de Faith, cela renforçait sa position en ce sens. Il laissa ensuite ses souvenirs dériver vers des souvenirs plus agréables, Venise, la mer. La Grèce.

Le marin se souvenait encore assez distinctement de la sensation du vent salé qui s’engouffrait dans ses cheveux et qui caressait sa peau. Les soirées avec les autres marins, dans la cale à se saouler jusqu’au fond des tonneaux. L’insouciance de ces hommes pendant que le monde brûlait. Les derniers moments de calme de l’humanité. Tout ça lui manquait cruellement, plus encore depuis l’épisode de Sanders.

- Ca l’était… On ne restait jamais que quelques jours. Mais on voyait du pays.

Il avait vu un tas de continents et de lieux différents. Il se sentait à l’étroit, dans le Bâtiment, mais il n’avait guère le choix. Il ne pourrait pas survivre seul jusqu’au port, et il ne savait pas quel serait l’accueil dans ces contrées. Vu le monde actuel, mieux valait ne pas s’y lancer seul… Il écouta Faith parler de sa chance à Boston, dans la Maison Blanche, mais… Il finit par tourner la tête vers elle pour la voir boire une grande gorgée d’alcool après lui avoir souri. Un sourire qu’il lui rendit volontiers. Il était content de l’avoir rencontrée, lui aussi. Faith lui avait toujours été sympathique, et il appréciait sa compagnie. Elle dérivait quelque peu sur une sorte de destin, ou de raison pour laquelle certaines choses arriveraient. Il ignorait s’il était d’accord avec cette vision, mais il n’était pas fâché que ce destin, s’il existait, l’ait mené sur la même route que la demoiselle. En tout cas, ses mots avaient quelque chose de rassurant, et de réconfortant. Vraisemblablement, il y avait encore au moins une personne qui tenait suffisamment à lui. La blessure n’aurait été que plus profonde si Faith avait décidé de lui tourner le dos, elle aussi.

- Merci à toi… Je ne sais pas si tout arrive pour une raison, mais que ce soit le cas ou pas, je suis content que mes pas m’aient mené sur la même route que la tienne.

Theon lui rendit un nouveau sourire, et il sentit la main de son amie sur son épaule, un autre contact qui lui évoquait du réconfort et un certain apaisement, un rappel qu’il n’était pas seul, finalement. Il se tourna vers elle, son corps lui faisant face désormais plutôt que d’être tourné vers la fenêtre, et il réfléchit à sa demande. Faire quelque chose, pourquoi pas, mais quelque chose qui ne réveillerait pas tout le bâtiment, et donc, taper sur des zombies était exclu, évidemment. Et puis, il n’en avait pas forcément envie. Le calme de la discussion le faisait se sentir bien et il n'avait nulle envie de le briser.

- Et bien, s’asseoir et boire en bonne compagnie me suffit personnellement amplement, surtout au vu de la rareté de l’alcool. On ne peut pas dire que je sois vraiment fatigué.

Il utilisait moins d’énergie à l’ingénierie que dans l’équipe tactique, évidemment. Physiquement, ce n’était pas la même charge de travail, et puis, il était désormais bien réveillé.

- A moins que tu n’aies une autre suggestion ?

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En effet, Theon n’était pas quelqu’un de foncièrement compliqué dans ses passe-temps. Dans le monde actuel, il se contentait clairement de peu. Même s’il devait admettre qu’il donnerait beaucoup pour prendre la mer à nouveau, il avait bien du mal à imaginer comment il serait possible de le faire. Le calme lui suffisait, pour l’instant. Simplement la possibilité de se détendre était assez rare. L’alcool l’était tout autant, alors, oui cela lui convenait.

Il regarda Faith, tandis qu’elle mentionnait une idée qui n’était, apparemment, pas la meilleure du siècle. Il espérait seulement qu’elle ait abandonné l’idée d’aller tabasser des zombies, le Greyjoy n’était pas d’humeur. Mais il comprit rapidement que ce n’était pas l’idée évoquée par Faith. En fait, il le comprit à la seconde où il vit ses yeux se poser en dessous de leur point habituel, en dessous de ses yeux. C’était ses lèvres qu’elle regardait. Theon n’était pas naïf. Les marins avaient la réputation de ne pas l’être.

Etait-il différent ? Il n’en savait rien, au fond, il ignorait ce qu’elle voulait dire par là. Est-ce que c’était le moment de poser la question ? Pas vraiment. Il pourrait toujours y revenir plus tard. Pour l’instant, il la laissait aller jusqu’au bout de son raisonnement. La bouteille était sur le sol, et Faith se rapprochait. Le marin sentit un frisson de chaleur lorsque l’index de Faith parcourut son torse à travers son t-shirt. Oublier le reste semblait être un très bon plan, en réalité.

- Voilà qui est… tentant.

La distance entre eux s’était considérablement réduite. Theon observait attentivement la demoiselle qui se trouvait face à lui. Dire qu’elle ne lui plaisait pas serait mentir. Honnêtement, Faith avait tout le charme nécessaire, et elle demeurait quelqu’un qu’il appréciait. Pour autant, il n’avait jamais souhaité dans sa relation tumultueuse avec Kirigan, ni dans son deuil. Mais puisqu’elle faisait le premier pas, Theon n’avait aucune raison de faire machine arrière. Il ne tarda pas à répondre au baiser de Faith, glissant instinctivement sa main sur sa taille pour la garder contre lui. Dès lors qu’elle rompit le baiser, ses yeux bleus retrouvèrent les siens. Theon savait très bien faire la différence entre les relations charnelles et le reste. Sa vie en avait été parsemée, il ne craignait pas réellement ce qui allait se passer. En tout cas, Faith enchaînait les arguments, ignorant sans doute qu’elle prêchait un convaincu.

- Je n’ai donc aucune raison de te demander d’arrêter…

Un sourire au bord de la taquinerie naquit sur son visage. La main de Faith posée sur son torse, il trouva son dernier argument presque amusant. D’un geste vif, Theon renversa la situation, en coinçant le corps de la tacticienne entre le mur, à côté de la fenêtre, et lui-même.

- Je me fous pas mal de ce que les autres savent ou pas

En fait, pour lui ça ne ferait jamais qu’une réflexion de plus parmi toutes les autres. Faith risquait probablement plus que lui dans l’affaire, et de toute façon, n’avaient-ils pas tous passé l’âge de créer des ragots sur les affaires des autres, de toute façon ?Theon n’avait jamais caché grand-chose. Bien sûr qu’il ne le crierait pas sur tous les toits, mais franchement, il n’avait aucun problème personnel avec l’idée que qui que ce soit soit au courant.
Ce fut à son tour de voler un baiser à Faith, sa seconde main s’appuyant contre le mur. Au bout d’un moment, il le rompit pour poser ses lèvres sur sa mâchoire, descendant petit à petit jusque dans sa nuque. Il mordilla de temps à autres la peau de son cou. Pour l’instant, il prenait son temps, il testait les réactions de Faith, pour faire monter la tension.

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Il n’était pas foncièrement difficile d’inciter Theon à prendre une telle direction. Il refusait rarement, d’autant lorsqu’il s’entendait bien avec la personne qui se trouvait devant lui. Faith était à la fois physiquement son style et son amie, il lui faisait confiance. Il n’avait cependant jamais voulu poser un pied dans le bourbier que semblait être son histoire avec Kirigan. Theon aimait les plaisirs charnels, mais il ne voyait pas l’intérêt de s’attirer des problèmes pour eux. Ca n’en valait pas le coup. Aujourd’hui, la situation était totalement différente. Et ça n’était clairement pas une mauvaise chose à ses yeux. Il savait faire la différence entre l’amitié et les relations charnelles, après tout, il l’avait toujours fait.

L’heure n’était cependant plus vraiment aux mots, mais aux actes. Il lui fallut peu de temps pour coincer le corps de Faith entre lui et le mur du bâtiment. L’entendre dire qu’il lui était égal que quelqu’un soit au courant avait quelque chose de rassurant et d’excitant à la fois. La position de Theon dans la communauté en aurait fait hésiter certaines, sans doute. Ce n’était pas son cas à elle, ça ne l’était jamais. Elle avait toujours assumé son amitié avec lui, et c’était quelque chose qu’il avait toujours apprécié. Dans ce contexte, ça l’était d’autant plus. Rapidement, il sentit les ongles de la stratège dans son dos, faisant tendre et détendre ses muscles dorsaux à leur contact. Theon demeurait attentif aux réactions de Faith, il remarqua sans mal qu’elle lui donnait aisément accès à sa nuque. Il l’entendit souffler, ce qui l’encouragea à prolonger ce jeu de taquinerie entre sa peau et lui. Finalement, il sentit la main de Faith sous son t-shirt, et il se sentit frissonner légèrement à son contact.