Rester avachie, là, sans rien pouvoir faire, ce n’était pas vraiment le plus plaisant à vivre. Eretria fulminait de l’intérieur, alors qu’elle ne pouvait rien faire d’autres que subir, obligée d’attendre que l’on daigne répondre à certaines questions qui s’étaient élevées. Des questions légitimes, mais auxquels la jeune femme ne s’attendait pas vraiment à avoir de réponse très claire. Tout ça, elle avait l’impression d’assister à un spectacle dans lequel personne ne lui avait parlé de son rôle. Une vaste blague qui n’en n’était pas une et qui ne faisait rire personne. Alors elle attendait, rongeant son frein parmi quelques remarques acerbes, mais sans pour autant se faire remarquer. Elle avait besoin de mieux comprendre ce qu’il se tramait pour faire quoi que ce soit et, pour l’heure, elle était autant dans l’ignorance que les autres. Une ignorance qui l’agaçait autant que d’avoir été sortie de son lit sans sommation.

L’attente est longue. Trop longue pour celle qui ne trouvait même pas une position confortable sur ce sol froid. Qu’est-ce qu’elle aimerait pouvoir agir, faire quelque chose, mais tout ce qu’Eretria faisait, c’était de s’enfermer dans le silence et la solitude. Elle avait pu repérer du regard, quelques personnes qu’elle connaissait pour les côtoyer au Train ou lors de mission. Seulement, contrairement à d’autres, elle ne cherchait pas à s’en approcher, préférant éviter tout établissement de lien. On disait qu’en ces temps apocalyptiques, les morts étaient le danger le plus envahissant, mais cela n’avait jamais été la pensée de l’Hispanique. Très rapidement, elle avait ciblé l’humain comme le plus grand danger et son raisonnement prenait preuve en cette nuit sanglante. Alors il était hors de question qu’elle puisse donner la moindre emprise sur elle, en cherchant à trouver ceux qui pouvaient lui être chers. Pas sans avoir le moindre élément pouvant tourner en sa faveur. Alors elle mettait ces longues minutes d’attentes à profit, laissant son esprit analyser ce que ses yeux observaient. Un roulement de garde sans queue ni tête, une foule effrayée et pouvant montrer les mêmes signes d’impatience qu’elle refoulait. Rien de bien mirobolant et qui ne faisait qu’exacerber l’agacement déjà présent pour la transformer en colère.

Puis il y eut cette femme, à quelques pas d’elle, qui eut l’audace de faire ce que personne n’avait fait jusqu’à présent. En se levant pour tenter de prendre l’arme d’un garde, elle s’apprêtait à recevoir les encouragements de l’Hispanique. Mais Eretria n’eut rien le temps de faire, qu’un coup de feu retentit, suivi par le cri de la pauvre victime s’effondrant au sol. Un acte qui aurait pu soulever un mouvement de cette foule prisonnière, mais dont toute rébellion fut stopper par les rafales qui s’en suivirent. Des rafales qui résonnèrent dans les oreilles de la jeune femme, se trouvant parmi les plus proches. Une grimace prit place sur son visage, alors que la pause tardive de ses mains sur ses tympans n’empêcha pas le sifflement de prendre place dans ses oreilles. L’homme à l’origine de tout ce bordel se montra enfin et ses paroles fusèrent aussi violemment que les tirs tout juste tirés. Bien que l’envie se faisait présentée de ne pas faire preuve d’attention, Eretria l’écouta tout de même déblatérer son speech et ainsi asseoir son autorité sur les captifs. Une autorité qui avait plus l’air d’un règne de terreur qu’autre chose. Mais pour le moment, la jeune femme préféra ne pas commenter, focalisant aussi son attention sur la blessée. Elle avait beau ne pas être médecin, elle savait que si personne n’agissait vite, ils seraient tous en présence d’un macabé qui souhaiterait ne faire qu’une bouchée d’eux. Or, seul les gardes avaient actuellement les moyens d’éviter un début de carnage.

Heureusement, certains décidèrent d’agir. Eretria, quant à elle, ne savait pas trop quoi faire pour les aider et craignait plus de les déranger. Ce fut quand une femme, s’annonçant comme médecin, l’interpella, qu’elle fit disparaître les quelques mètres tout en se débarrassant de sa veste pour venir aider à contenir le sang dans la blessure.

— Je n’ai as de tampons, désolée. Mais il doit bien y avoir une trousse à pharmacie ou quelque chose avec de quoi appliquer les premiers soins par ici, non ?  

Après tout, ils se trouvaient bien dans un lieu public et, qui plus est, habité par une communauté. Alors la jeune femme décida d’élever un peu plus la voix, cherchant ainsi à happer l’attention de ceux qui pouvaient bien connaître les lieux, mais aussi de ces maudits chiens de garde qui ne bougeait pas le petit doigt.

— Eh ! Personne ne sait où trouver une trousse de premier secours ? À moins que vous vouliez vous faire un rôdeur en plus de ce merdier !

Car si Eretria se doutait bien qu’il y en aurait une quelque part, encore fallait-il que les soldats les laissent aller la chercher. Or ça, c’était un autre problème qui allait se poser et qui allait faire grincer des dents. Mais Eretria n’était pas dupe, elle savait bien que, même en essayant de jouer la carte de la surprise, elle n’irait pas bien loin si elle tentait une traversée pour trouver quoi que ce soit en plus de cette ceinture tendue par un homme.