Et bien - c'était fini. Une invasion surprise par une milice entière de fanatiques militarisés, suivie par un soulèvement dans le musée où ils avaient tous été enfermés, suivie par une soudaine vague de zombies ? Peu de gens auraient cru que qui que ce soit y survivrait. Astarion, généralement très négatif, avait clairement cru que c'était la fin. En vérité, pendant tout un moment, il s'était demandé comment tenter de rejoindre le camp des gagnants (trahir son groupe et s'allier avec ces soldats ne lui plaisait pas spécialement, mais si c'était le prix de la survie...) jusqu'à ce que la bataille de la résistance commence, lui forçant la main.

Il avait hurlé intérieurement, même alors qu'il s'apprêtait à se battre auprès de ses compagnons, certains que ces imbéciles finis les avaient tous condamnés avec leurs idées d'héroïsme. Et pourtant, Dieu savait comment, ils avaient réussi à renverser la situation. Et ils avaient survécu. Même quand une horde de zombies s'en était mêlée, ils avaient survécu. Un jour nouveau était venu, et les survivants, épuisés, avaient fait ce que tous les survivants faisaient chaque jour depuis le début de cette apocalypse et... continué à survivre. En soignant les blessés. En prenant soin des morts. En réparant les dégâts.

Astarion n'était pas insensible. Tout cet événement l'avait choqué, comme tout le monde. La peur de se faire réveiller en pleine nuit avec une arme sur le nez. De se faire tirer jusqu'à une destination inconnue sans ménagement. L'humiliation qui allait avec. Et puis, ce combat. Il avait tué quelqu'un, à nouveau - pris une vie, pour la première fois depuis... Bref : il était chamboulé. Pourtant, il prétendait que ce n'était pas le cas, ayant très vite retrouvé son masque de désintérêt amusé. Il espérait que le mouvement serait bientôt lancer pour quitter ce musée trop bondé et retourner dans sa propre communauté. Mais avant ça... il y avait quelqu'un avec qui il voulait parler.

Il l'avait reconnue tout de suite, quand leurs regards s'étaient croisés - et elle l'avait reconnu aussi, il était sûr. C'était une ancienne collègue, Josephine - une ancienne collège, et plus que ça. Ils avaient eu... une aventure. Rien de bien sérieux - elle était une charmante jeune femme, mais il n'était clairement pas prêt à s'engager dans quoi que ce soit de plus qu'un peu d'amusement. Elle s'était fiancée peu après. out ça semblait très, très loin... Mais l'avoir revue, soudain, au milieu de tout ce chaos, ça l'avait marqué, en un sens. Et maintenant il la cherchait, ne serait-ce que pour s'assurer qu'elle allait bien...

Il la repéra enfin, de dos, et s'approcha. Elle l'entendit arrivée et se retourna par elle-même. Il fit un léger sourire traverser son visage...

-"Je me demandais si tu allais me reconnaître, darling." Il lui offrit un sourire bien étudié, comme s'ils se revoyaient au bureau, autour de la machine à café, après de longues vacances, et pas dans une ville en ruine après la chute de la société humaine.. "Le sentiment est mutuel. Je ne m'attendais pas à reconnaître qui que ce soit dans cette foule. Je suis heureux que tu ailles bien." Il avait perdu de vue tout le monde, de son ancienne vie. A sa connaissance, ils étaient les deux derniers de leur ancienne firme à être encore en vie. "Je vis dans une communauté plus loin, dans la forêt. Autour d'un train, tu as du en entendre parler ...? C'est... rustique. Mais je suis encore en vie, donc on doit faire quelque chose correctement."

Elle l'interrogea sur ses blessures. Heureusement, il n'y avait pas grand-chose à signaler. Il écarta les bras.

-"Quelque éraflures. Rien de grave. Et toi ?"

the crows are circling overhead
there is no body
only you

Un visage que l'on oubliait pas, hein ? Il était bon de savoir que malgré les circonstances, il était toujours lui-même. (Il avait été quelque peu obsédé par son image, dans le monde d'avant. C'était moins facile, aujourd'hui.) "Tu n'as pas changé non plus." De doux mensonges. L'apocalypse aveitn été éprouvante pour eux deux. Et pourtant, ils étaient toujours là...

Josephine n'avait pas été trop fortement blessée non plus : une cheville foulée, mais qui manifestement ne l'empêchait pas de marcher - vu les circonstances, ça aurait pu être bien pire. Ils parlèrent brièvement de leurs nouvelles vies, des endroits où ils vivaient. Elle s'était installée au musée, manifestement... Pas étonnant qu'ils ne se soient jamais revus, Astarion n'avait eu aucun contact avec cette communauté depuis le début de l'apocalypse.

Comme lui, elle s'était retrouvée seule, au début de l'apocalypse. Aucune mention de son fiancé - ce qui ne pouvait rien signifier de bon. Astarion n'allait pas creuser, son but n'était pas de réveiller des souvenirs douloureux, surtout aujourd'hui et maintenant.

-"J'ai passé les premiers mois en solitaire", expliqua-t-il à son tour. "Mais après quelques mauvaises rencontres qui ont presque mal tourné, j'ai décidé qu'il serait plus prudent de rejoindre un groupe." Vivre en communauté n'était pas facile tous les jours. Il n'était jamais réellement à son aise avec les gens : même après des années de vie en communauté, il ne s'était jamais réellement ouvert avec eux. Cependant, force était de constater que vivre avec eux était sa meilleure chance de survie. Et il comptait bien survivre, aussi longtemps que possible. "Mais personne n'était prêt pour cette attaque. J'espère qu'on le sera pour la prochaine." Car il y aurait une "prochaine fois", forcément. Ils avaient déjà eu de la chance d'avoir la "paix" pendant si longtemps. Il songea à Sanders - et à son père, et à tous les hommes du même genre. "Il y a toujours eu des hommes comme ça, dans le monde. Cette apocalypse a juste dû lui donner une occasion de réaliser ses rêves de petit tyran."

Elle commenta qu'au moins, malgré les circonstances, la situation leur avait permis de se revoir. Ah ! Le verre à moitié plein, c'est ça ?

-"Oh, oui ! Nous devrions nous faire capturer par des militaires furieux plus souvent !", répliqua-t-il, ironique, à la limite de la moquerie. Il regarda autour d'eux d'un air appréciateur. "Vous n'êtes pas trop mal, ici - si on met de côté les cadavres qui trainent et les traces de sang. Un peu de nettoyage, et on y vivrait." En vérité, il était réellement admiratif - ce musée semblait bien plus confortable que la communauté où il vivait. Bon, manifestement, ils pouvaient mieux faire au niveau de la sécurité... mais le train n'avait pas valu beaucoup mieux, en ce jour, donc qui était-il pour juger ! "J'espère que ta serre n'a pas trop été endommagée par ces sauvages. Tu as déjà pu aller voir ?"

the crows are circling overhead
there is no body
only you

Rejoindre une communauté avait été, selon Josephine, une sage décision. La meilleure chose à faire pour rester en sécurité. Astarion aurait été d'accord, s'il ne venait pas de frôler la mort aux côtés de cette même communauté. S'il était resté solitaire, aurait-il échappé à l'attaque de Sanders ? Eh. Oui - probablement parce qu'il serait déjà mort depuis longtemps. Pour être honnête, par les temps qui courraient, il n'y avait vraiment pas de bonne solution.

Josephine était remontée - prète à prouver à ceux qui, dans le futur, essayeraient encore de s'attaquer à leur ville, que les habitants de Silvergate le leur feraient payer. Mine de rien, elle était une battante : il fallait bien pour avoir survécu jusqu'ici. Astarion était moins optimiste qu'elle. Ils avaient survécu aujourd'hui, ce ne serait peut-être pas le cas demain. Peut-être même vaudrait-il mieux laisser tomber - quitter le train, quitter la ville, chercher refuge ailleurs.

La jeune femme avoue ensuite plusieurs choses. Elle reparla de l'attaque - d'un moment où elle avait été prête à abandonner, à cesser de se battre, jusqu'à ce que leurs regards se croisent à tous les deux. Et puis elle parla de son ex, le fiancé du monde d'avant qui était mort en la protégeant pour qu'elle puisse rejoindre ce musée. Les choses avaient été difficiles pour elle. Pour tous le monde, ajouta-t-elle. Tout le monde avait son histoire tragique.

C'était un aveu intense, et qui le prit quelque peu de court. Il avait presque envie de répondre comme d'habitude, en utilisant son sarcasme et son ironie comme mécanisme de défense. "Mais bien sûr, ma chérie, que mon visage t'a donné envie de survivre ! On me le dit souvent." Mais même lui sentait que ça aurait été déplacé. Et pour une fois, il ne voulait pas être cette personne. Pas pour elle, et pas maintenant.

-"Ce n'est rien. C'est... une situation difficile pour nous tous." Il ne savait pas vraiment quoi dire. Il était un beau parleur mais la sincérité n'était pas son fort. "Je suis juste content que tu ailles bien. Il n'y a certainement pas que du mauvais dans cette apocalypse - surtout tant que tu restes parmi nous."

La proposition de visiter la serre vint comme une bouée de sauvetage.

-"J'aimerais bien." Changer d'air, changer de sujet. L'intérieur du musée commençait à devenir oppressant, le sang et les blessés allaaient finir par le rendre malade. L'idée d'une serre calme et verdoyante était tentante. Il ne s'attendait pas à un merveilleux jardin paradisiaque. On restait dans un monde post apocalyptique où la mode était plutôt aux contructions utilitaires de fortune, pas aux jardins de plaisance. Mais on faisait avec ce qu'on avait.

Il la suivit en continuant à réfléchir à ses mots. Astarion n'avait jamais été quelqu'un de particulièrement héroïque - ni même spécialement bon. Il avait pris les armes aujourd'hui pour sa propre survie plus que pour celle du groupe. Et il n'avait certainement jamais pensé être quelqu'un qui inspirerait quelqu'un d'autre comme Josie le décrivait.

-"Pour ce que ça vaux - je suis désolé, pour ton fiancé. Il avait l'air d'un homme bien. Probablement pas le genre de personne qui voudrait que tu te sentes responsable."

the crows are circling overhead
there is no body
only you

Être dans une vraie relation. Il supposait qu'il n'avait jamais vraiment connu ça. Un tas de personnes qui allaient et venaient dans sa vie, qu'il ne laissait jamais trop se rapprocher, qu'il chassait parfois lui-même si elles semblaient trop s'attacher... Mais pas de vrai amour. Et si on lui avait dit que c'était triste, il aurait répondu, "au moins je n'aurai jamais à pleurer la mort de mon fiancé aux mains de zombies"...

Josie le guida bel et bien jusqu'à la fameuse serre. Un peu sombre, un peu miteux - et merveilleusement calme et vide de cadavres. Que demander de plus ? Quelques légumes poussaient dans la terre, à priori non dérangés par toute l'action qui avait secoué la ville. Ils avaient plus de chance que les humains.

Petite indulgence, Josephine alla leur récolter deux carottes, puisque selon elle, elles étaient prêtes... Et oui, en effet, une fois nettoyées, elles avaient l'air très bien. Astarion croqua dans la sienne avec reconnaissance. Et le pire, c'est qu'il aimait ça ! Lui qui, autrefois, avait fréquenté les meilleurs restaurants et collectionné les meilleurs vins ! L'apocalypse avait décidément ses moyens de vous rendre humble !

Ils grignottèrent en silence. Il avait bel et bien faim, et ce n'était pas ça qui allait le rassasier, mais ça passait bien quand même. Josephine demanda soudain s'il allait repartir, bientôt. Etait-ce un peu de regret dans sa voix ? Avait-elle envie qu'il reste ?

-"Oh, et bien," Il fit mine de réfléchir à la question. En vérité, il n'avait pas envie de rentrer tout de suite - et pas uniquement parce qu'il était fatigué. "Je pense avoir entendu certaines personnes chercher des volontaires pour rester encore un jour. Histoire de pouvoir transporter nos blessés plus tranquillement, éventuellement vous donner un coup de main ici avant de repartir..." Il leva les yeux au ciel. "Eugh. Transporter des blessés, tu imagines ? S'ils sont trop blessés pour se déplacer eux-même, je ne vois pas pourquoi ça devrait être mon problème..."

Ils surjouait un peu, mais il n'avait jamais été un bon samaritain. Sa seule raison de lever un petit doigt pour aider qui que ce soit au train, c'était qu'il voulait se faire bien voir, être accepté. Mais ici, il y avait peut-être une autre raison pourqu'il aie envie de passer la nuit.

-"Ceci étant dit. Je pourrais quand même rester encore un peu. Rien ne m'oblige à repartir tout de suite, après tout. On mérite bien un peu de repos, tous les deux."

the crows are circling overhead
there is no body
only you

S'occuper des blessés ne le réjouissait pas spécialement. Les plantes de la serre... c'était pas la grosse joie non plus, mais au moins, elle ne geindraient pas de douleur. "Tu me vends du rêve, ma belle." Il s'esclaffa. "Très bien, adjugé, vendu. Mais je te préviens : j'ai beaucoup de talents, mais je n'ai pas la main verte. Ne te plains pas si toutes ces carottes sont mortes demain soir."

Travailler avec elle lui ferait plaisir. Comme au bon vieux temps... Si on remplaçait un élégant bureau d'avocat par un musée d'art transformé en refuge post-apocalyptique.

Josie le remercia de rester. Elle parlait déjà du dortoir, où il pourrait se reposer... s'il voulait. Il n'en avait pas spécialement envie, et elle n'en avait pas l'air non plus. Dormir ? Même s'il était fatigué, il aurait eu du mal à fermer l'oeil, après cette journée de fous. Il venait de retrouver quelqu'un qu'il appréciait... Il voulait en profiter un peu, et ne pas penser à la journée difficile de demain.

-"Nous ne sommes pas obligés de repartir tout suite, si ?" Il regarda autour d'eux. Josephine s'était rapprochée de lui, posant une main sur son bras. "C'est calme, ici, et pas trop inconfortable... Je suis sûr que personne ne nous en voudrait si nous restions un peu juste à deux..."

Pensait-il à quelques folies, des galipettes dans la serre pour célébrer leur victoire ? Pas vraiment, pour une fois. Il ne voulait pas s'imposer l'ambiance surchargée d'un dortoir, mais pas non plus rester seul. Il voulait juste... profiter un peu de sa présence. Parler encore, jusqu'à ce que le sommeil les atteigne...

Il passa son bras sur ses épaules. Voilà... Comme ça, s'était bien, non ?

-"Quelle vie de fous, hein ? Tu aurais cru te retrouver ici, comme ça, un jour ?"

the crows are circling overhead
there is no body
only you

Astarion n'était pas particulièrement fan des travaux manuel - ses mains n'étaient pas faites pour ce genre de choses. Mais depuis le début de l'apocalypse, il avait bien dû s'y faire. Malheureusement, sa connaissance du code pénal américain ne servait pas à grand chose dans le monde actuel.. mais planter des carottes, ça, c'était un talent utile !

Ils évoquèrent un peut le passé - pas des tragédies, mais des petites choses qu'ils avaient perdues et qui leur manquaient. Un ton plus léger, un humour qui était nécessaire pour rester sain d'esprit après une journée pareille...

-"Oh ! Le café n'est que le début des choses qui me manquent." Il fit mine de les énumérer sur ses doigts. "Mes vêtements, ma voiture, mon restaurant préféré, le bar au coin du bureau... Oh, et n'oublions pas mon lit. Tu sais que dans le train, j'en suis réduit à dormir dans un sac de couchage ? Et les insectes... Ugh ! Je me demande parfois si je ne ferais pas mieux de devenir un zombie."

Il plaisantait évidement. Même si ça aurait été mentir de dire que les conforts de la vie en société ne lui manquaient pas tous les jours... non... toutes les heures. Il n'était pas fait pour la vie dans la nature.

-"Si j'avais pu prédire tout ça... et bien, pour commencer, tout le monde m'aurait pris pour un fou." Il passa doucement son pouce le long de son bras, appréciant également ce moment. "J'aurais investi dans un bunker caché sous mon appartement. Avec une réserve de bon vin, et un lit correct - et des draps en soie."

the crows are circling overhead
there is no body
only you

Ils se serrerent l'un contre l'autre, continuant de parler - leurs voix étaient la seule chose qui troublait le calme de cette petite serre de fortune. La discusion akkait ça et là, entre traits d'humour un peu désespéré, vieux souvenirs, et même gestes d'affection sincère. Josiephine lui demanda soudain ce qu'il ferait, si elle devait être contaminée par les zombies. Un scénario à éviter à tout prix, surtout maintenant qu'ils venaient de se retrouver !

-"Je ne sais pas... Peut-être que je t'enfermerais dans un placard, le temps qu'on trouve une cure ?" Qui y croyait ? Absolument personne.

Elle affirma qu'elle l'aurait cru, s'il avait été capable de prédire tout ceci. Astarion, lui, n'aurait jamais pu avaler un avenir aussi fou avant de l'avoir vu de ses propres yeux. Des zombies ? La fin du monde ? C'était le genre de théories que seuls des gens déments auraient pu accepter. Et pourtant... Au final, tous ces lunatiques qui creusaient des abris anti-atomiques dans leurs jardins et qui faisaient des réverses de grains et de boîtes de conserves avaient eu raison. Quelle était la morale, là-derrière ? Peut-être simplement qu'une horloge cassée est correcte deux fois par jour.

Il réprima une grimace en entendant Josie mentionner sa famille, et se tendit un peu, un instant. La famille, un sujet tabou ! Pour Josephine, c'était ce qui lui manquait le plus, aujourd'hui. Elle aurait tout donné pour les retrouver. Un sentiment qui était fréquent chez les survivants de l'apocalypse... Et bien ! Pas chez Astarion. Il s'était assuré qu'il ne reverrait plus jamais ses parents, et c'était peut-être la seule chose positive qu'il y avait à trouver dans le nouveau monde.

C'était ironique qu'elle dise qu'il lui redonnait l'espoir de les revoir, car lui-même était plutôt cynique et ne croyait pas vraiment en ses chances de les retrouver. Il se força pourtant à rester neutre en répondant : "Et bien... Qui sait ? Plus de gens ont survécu qu'on le penserait." Dans le fond, c'était vrai. Il avait été surpris, aujourd'hui, de voir le nombre de gens que les soldats de Sanders avaient réussi à traîner jusqu'au musée. Ils étaient nombreux à survivre à Silvergate, mine de rien - et encore plus nombreux en dehors de la ville, sans aucun doute.

Il soupira. Reposa sa tête contre la sienne et ferma les yeux à son tour.

-"Toi et moi, nous sommes encore en vie... C'est le plus important."

the crows are circling overhead
there is no body
only you